« Est-ce que le pervers narcissique est heureux ? » Cette question revient avec une fréquence surprenante chez les victimes d’emprise. Elle peut sembler étrange — pourquoi s’inquiéter du bonheur de celui qui vous a détruit ? — mais elle révèle en réalité quelque chose de profond sur la nature de la relation d’emprise et sur le processus de guérison. Se demander si le pervers narcissique est heureux, c’est chercher à comprendre ce qui l’anime, c’est tenter de donner un sens à la souffrance infligée, c’est parfois aussi nourrir secrètement l’espoir qu’il souffre autant que vous. Cette question en apparence simple ouvre en réalité sur des réflexions complexes touchant à la nature de l’humanité, du bonheur, de la conscience, et de la justice. Elle nous force à confronter une vérité difficile : le pervers narcissique ne fonctionne pas selon les mêmes paramètres émotionnels et existentiels que vous. Comprendre cela est crucial pour votre libération — non pas pour excuser ses actes, mais pour cesser de le mesurer à votre propre aune et ainsi vous libérer de l’emprise résiduelle qu’exerce sur vous la question même de son bien-être.
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Une conception matérialiste et superficielle
Pour comprendre si le pervers narcissique est heureux, il faut d’abord saisir que sa conception même du bonheur diffère radicalement de celle des personnes dotées d’une vie émotionnelle authentique. Le pervers narcissique ne recherche pas la paix intérieure, la connexion profonde, l’épanouissement personnel ou ces moments de plénitude tranquille que la plupart des gens associent au bonheur. Son « bonheur », pour autant qu’on puisse l’appeler ainsi, se mesure en termes de pouvoir, de contrôle, de domination, et de validation narcissique.
Il est heureux quand il triomphe, quand il écrase, quand il domine, quand il manipule avec succès, quand son image sociale est éclatante, quand il accumule les signes extérieurs de réussite. Son bonheur est celui du prédateur qui vient de capturer sa proie, du joueur qui vient de gagner une partie, du comédien qui reçoit une standing ovation. Ce n’est pas un bonheur paisible et durable — c’est une excitation, une stimulation, un sentiment de toute-puissance momentané qui retombe aussitôt et nécessite une nouvelle « dose ».
Cette conception du bonheur est profondément matérialiste et superficielle : la belle maison, la voiture de luxe, le poste prestigieux, les conquêtes multiples, l’admiration des autres. Tout ce qui peut être montré, étalé, utilisé pour impressionner. Mais ces acquisitions ne comblent jamais le vide fondamental — elles ne font que le masquer temporairement. C’est pourquoi le pervers narcissique est dans une quête sans fin : il accumule, séduit, conquiert, sans jamais être satisfait, car ce qu’il cherche réellement (une validation interne, un sentiment de valeur intrinsèque) ne peut pas être trouvé à l’extérieur.
Le masque du bonheur parfait
Publiquement, le pervers narcissique affiche souvent une image de bonheur exemplaire. Sa vie semble parfaite : relation idyllique (au début), succès professionnel éclatant, vie sociale riche, loisirs enviables. Il poste sur les réseaux sociaux des photos de bonheur conjugal, de vacances paradisiaques, de réussites professionnelles. Il raconte des anecdotes hilarantes, se présente comme quelqu’un de joyeux, épanoui, entouré. Ce masque de bonheur fait partie intégrante de son image grandiose — il doit être vu comme quelqu’un qui « réussit sa vie ».
Mais ce masque sert aussi un objectif plus insidieux : faire douter la victime. Quand vous tentez de décrire votre souffrance à votre entourage, on vous rétorque : « Mais il a l’air si heureux ! », « Elle semble tellement épanouie ! », « Comment peux-tu dire qu’il est malheureux avec toi alors qu’il a l’air si bien ? » Cette dissonance entre l’image publique de bonheur parfait et la réalité privée de cruauté systématique ajoute une couche de confusion et de doute chez la victime. « Peut-être que c’est moi qui le rend malheureux ? », « Peut-être qu’il serait heureux avec quelqu’un d’autre ? »
Valentine raconte : « Sur Facebook, il postait des photos de nous avec des légendes romantiques. Les gens commentaient : “Quel couple parfait !” Le soir même, il m’avait insultée pendant deux heures. Cette dissonance me rendait folle. »
L’incapacité fondamentale de ressentir
Mais au-delà du masque, existe-t-il une expérience subjective de bonheur chez le pervers narcissique ? La réponse est complexe. Le pervers narcissique souffre d’une alexithymie narcissique — une incapacité profonde à ressentir et à identifier des émotions authentiques et nuancées. Son monde émotionnel est appauvri, binaire : il connaît l’excitation et l’ennui, la rage et l’indifférence, le triomphe et l’humiliation. Mais la joie tranquille, la tendresse, la gratitude, la sérénité, l’émerveillement — ces émotions plus subtiles lui sont largement inaccessibles.
Peut-on vraiment parler de bonheur quand on est coupé de la richesse de la vie émotionnelle humaine ? Le bonheur n’est-il pas intimement lié à la capacité de ressentir profondément, de se connecter authentiquement, d’apprécier les moments simples ? Le pervers narcissique est comme quelqu’un qui serait daltonien émotionnellement — il voit le monde en noir et blanc là où d’autres voient des nuances infinies de couleurs. Sa vie émotionnelle est un désert, ponctué occasionnellement d’oasis de stimulation intense (conquête, domination, triomphe) qui s’assèchent aussitôt.
Jouissance plutôt que joie
Le pervers narcissique ne connaît pas la joie — cette émotion positive, lumineuse, qui surgit de la connexion, de la beauté, de l’amour. Ce qu’il connaît, c’est la jouissance — un terme qui en psychanalyse désigne une satisfaction sombre, presque douloureuse, liée à la transgression, à la domination, à la destruction. La jouissance du pervers narcissique est celle qu’il tire de l’humiliation de sa victime, de la réussite de sa manipulation, du sentiment de toute-puissance quand il contrôle complètement l’autre.
Cette jouissance est addictive mais jamais comblante. Elle procure une excitation intense mais brève, suivie d’un retour rapide au vide fondamental. C’est pourquoi le pervers narcissique est dans une quête compulsive de nouvelles sources de jouissance : nouvelles victimes, nouveaux défis, nouvelles transgressions. Il ne peut jamais s’arrêter, se poser, simplement être — car l’être, pour lui, c’est confronter le vide abyssal de son existence. L’agitation constante, la chasse perpétuelle, le maintien de multiples jeux de manipulation — tout cela sert à fuir cette confrontation.
Alors, le pervers narcissique est-il heureux ?
L’impossibilité de la paix intérieure
Si l’on définit le bonheur comme un état de paix intérieure, de contentement durable, de satisfaction existentielle, alors non, le pervers narcissique n’est clairement pas heureux. Il est en guerre permanente — guerre contre le monde extérieur (qui ne le reconnaît jamais assez), guerre contre ses victimes (qui menacent constamment de lui échapper), guerre contre lui-même (pour maintenir le faux self grandiose et refouler le vrai self honteux).
Cette guerre est épuisante. Contrairement à ce que les victimes imaginent parfois, la vie du pervers narcissique n’est pas une partie de plaisir sans conséquence. Maintenir en permanence le masque, gérer plusieurs victimes simultanément (famille, partenaire, collègues, maîtresses), calculer constamment ses coups, anticiper les menaces à son image, réprimer toute émotion authentique qui pourrait fissurer la façade — tout cela demande une énergie psychique considérable.
Un être rongé par le stress et l’anxiété
Le pervers narcissique vit dans un état d’hypervigilance paranoïaque. Il doit constamment surveiller son image, détecter toute menace potentielle, contrôler les narratifs multiples qu’il a créés. Il vit dans la terreur (souvent inconsciente) d’être démasqué, d’être vu tel qu’il est vraiment — faible, fragile, vide. Cette terreur génère une anxiété chronique qui ne trouve jamais de résolution. Même ses « victoires » (séduire une nouvelle proie, détruire un rival) n’apportent qu’un soulagement temporaire avant que l’anxiété ne revienne.
De plus, le pervers narcissique est prisonnier de son besoin compulsif de contrôle. Tout ce qui échappe à son contrôle — et inévitablement, beaucoup de choses y échappent — génère chez lui une rage narcissique intense. Il ne peut tolérer l’incertitude, l’imprévisibilité, la spontanéité. Il doit tout prévoir, tout orchestrer, tout manipuler. Cette obsession du contrôle est une prison dorée — elle crée l’illusion de la sécurité mais empêche toute vraie relaxation, toute vraie connexion, toute vraie vie.
Lou témoigne : « J’ai fini par réaliser qu’il était constamment stressé. Il ne pouvait jamais lâcher prise, jamais simplement profiter d’un moment. Même en vacances, il était tendu, contrôlant chaque détail, vérifiant constamment son image. »
L’intolérance à l’échec et à la critique
Le pervers narcissique ne peut tolérer l’échec ou la critique — ils représentent des menaces existentielles à son faux self grandiose. Là où une personne saine peut échouer, apprendre, grandir, le pervers narcissique s’effondre intérieurement (même s’il maintient la façade). Chaque échec, même mineur, réactive la honte fondamentale qu’il passe sa vie à fuir. Pour éviter cette confrontation douloureuse, il met en place des défenses massives : déni (« Ce n’était pas un échec »), projection (« C’est la faute des autres »), distorsion de la réalité (« En fait, j’ai gagné »).
Mais ces défenses, bien que protectrices, l’empêchent de tout apprentissage authentique, de toute croissance réelle. Il est condamné à répéter les mêmes patterns, à commettre les mêmes erreurs, sans jamais pouvoir intégrer l’expérience et évoluer. C’est une forme d’immobilité psychique profonde — le pervers narcissique à 60 ans fonctionne essentiellement de la même façon qu’à 20 ans, malgré toutes les « expériences de vie » accumulées. Cette stagnation existentielle, cette incapacité à devenir, à se transformer — peut-on vraiment l’appeler du bonheur ?
Une économie psychique épuisante
Le fonctionnement du pervers narcissique repose sur ce qu’on pourrait appeler une économie psychique de la pénurie. Il vit dans un monde où l’amour, l’admiration, la validation sont des ressources rares qu’il doit arracher aux autres par la force ou la ruse. Il n’a aucune capacité de générer ces ressources intérieurement — il dépend entièrement des autres pour réguler son narcissisme fragile. C’est une position de dépendance profonde, même si elle est masquée par une façade de toute-puissance.
Cette dépendance crée une insécurité chronique. Le pervers narcissique n’est jamais vraiment en sécurité car sa « survie » psychique dépend constamment de facteurs externes qu’il ne peut complètement contrôler. Que se passe-t-il si sa proie principale s’échappe ? Si son image sociale est ternie ? Si son corps vieillit et qu’il ne peut plus séduire aussi facilement ? Si sa carrière stagne ? Chaque menace à ses sources d’approvisionnement narcissique est vécue comme une menace de mort psychique. Il vit donc dans une précarité émotionnelle permanente, déguisée en arrogance et en certitude.
Peut-on le rendre heureux ?
Un bonheur auquel il n’aspire pas vraiment
Voici une vérité difficile à accepter pour les victimes : même si vous pouviez donner au pervers narcissique ce qu’il prétend vouloir, cela ne le rendrait pas heureux. Parce que ce qu’il prétend vouloir (« Si seulement tu étais plus… », « Si seulement tu faisais… ») n’est jamais vraiment ce qu’il cherche. Ses demandes sont des leurres, des moyens de vous maintenir dans une course infinie vers un objectif constamment reculé.
Le pervers narcissique ne veut pas vraiment que vous soyez parfaite — il a besoin que vous soyez imparfaite pour justifier sa cruauté, pour maintenir sa position de supériorité, pour avoir une cible pour sa rage. Il ne veut pas vraiment être aimé authentiquement — cet amour le confronterait à sa propre incapacité d’aimer en retour, à son vide émotionnel. Ce qu’il veut, c’est l’admiration, le contrôle, la soumission — et même quand il les obtient complètement, il n’est pas satisfait car le vide fondamental demeure.
Manon partage : « J’ai tout fait. J’ai changé ma façon de m’habiller, mes amis, mon travail, ma personnalité même. Je pensais que si j’étais exactement ce qu’il voulait, il serait enfin heureux et moi aussi. Mais chaque fois que je répondais à une exigence, une nouvelle apparaissait. J’ai fini par comprendre que le but n’était pas que je réussisse — c’était que j’échoue. »
L’erreur de la projection
Quand les victimes se demandent « Est-il heureux ? » ou « Puis-je le rendre heureux ? », elles commettent souvent l’erreur de la projection — elles projettent sur le pervers narcissique leur propre fonctionnement psychologique. « Si j’étais aimé de cette façon, je serais heureux, donc lui aussi devrait l’être. » « Si j’obtenais ce succès, cette reconnaissance, je serais comblé, donc lui aussi devrait l’être. »
Mais cette projection est fondamentalement erronée car le pervers narcissique ne fonctionne pas selon les mêmes paramètres. Il n’a pas accès à la même richesse émotionnelle, à la même capacité de satisfaction, à la même possibilité de contentement. Lui donner de l’amour authentique, c’est comme offrir un tableau magnifique à quelqu’un d’aveugle — il peut comprendre intellectuellement que c’est censé être précieux, mais il ne peut pas en faire l’expérience subjective.
Cette réalisation est à la fois libératrice et douloureuse. Libératrice car elle vous permet de cesser la course épuisante pour satisfaire l’insatiable, de comprendre que votre « échec » à le rendre heureux n’était pas dû à vos insuffisances mais à son incapacité structurelle. Douloureuse car elle vous force à renoncer à l’espoir que votre amour, vos efforts, votre sacrifice puissent « le sauver ». Il n’y a rien à sauver car il ne se perçoit pas comme nécessitant un sauvetage — au contraire, il se perçoit comme supérieur, et c’est vous qui « devriez » changer.
La fonction de la victime dans son système
Il est crucial de comprendre que dans l’économie psychique du pervers narcissique, la victime remplit des fonctions spécifiques qui nécessitent qu’elle reste dans un état de manque et de souffrance. Si la victime était vraiment épanouie, heureuse, comblée, elle ne pourrait plus servir de réceptacle pour ses projections, de source de valorisation narcissique, d’objet de contrôle, de cible de sa rage, ou de miroir de sa toute-puissance.
Votre souffrance n’est pas un effet secondaire malheureux de la relation — elle est le carburant même qui fait fonctionner le système. Tant que vous restez, en cherchant à le rendre heureux, vous fournissez exactement ce dont il a besoin : une source inépuisable d’énergie vitale qu’il peut vampiriser, une présence constante qui valide son importance, une cible pour sa cruauté. Ce n’est pas votre bonheur qu’il recherche — c’est votre disponibilité permanente comme objet de sa manipulation. C’est ce qui crée la dépendance affective si difficile à briser.
Ce que ressent vraiment le pervers narcissique
Des croyances fondamentalement négatives
Au cœur du fonctionnement du pervers narcissique se trouvent des croyances fondamentales profondément négatives sur lui-même et sur le monde. Malgré la façade grandiose, une partie de lui (soigneusement réprimée) « sait » qu’il est fondamentalement défectueux, indigne, vide. Cette connaissance insupportable est à l’origine de toute la structure défensive élaborée — le faux self grandiose, la projection massive, l’exploitation des autres.
Le monde est perçu comme fondamentalement hostile et dangereux. Les autres sont soit des prédateurs (qu’il faut dominer avant qu’ils ne vous dominent), soit des proies (à exploiter avant qu’un autre ne le fasse), soit des miroirs (à utiliser pour refléter la grandeur). Il n’existe pas de vraie connexion, de vraie mutualité, de vraie confiance possible. Cette vision paranoïaque du monde crée une solitude existentielle profonde que le pervers narcissique ne reconnaît jamais consciemment mais qui imprègne toute son existence.
Le vide fondamental
Au centre de tout cela se trouve ce que les cliniciens appellent le vide narcissique — une absence fondamentale de sens, de substance, d’identité cohérente. Le pervers narcissique n’a pas de self authentique stable. Il est une collection de masques, de performances, de réactions. En privé, seul avec lui-même, il fait face à ce vide abyssal — d’où sa fuite constante dans l’action, la stimulation, la manipulation.
Ce vide explique pourquoi le pervers narcissique ne peut tolérer la solitude. Non pas la solitude physique (il peut être seul dans une pièce), mais la solitude psychologique — être vraiment seul avec soi-même, sans distraction, sans performance, sans public. Cette confrontation avec le vide est terrifiante. C’est pourquoi il maintient toujours plusieurs relations simultanées, pourquoi il passe d’une victime à l’autre sans temps mort, pourquoi il est constamment occupé, agité, en quête de la prochaine stimulation. Son enfant intérieur blessé est à jamais inaccessible.
Le triomphe plutôt que la joie
Ce que le pervers narcissique expérimente n’est pas de la joie mais du triomphe. Le triomphe est l’émotion du guerrier qui a vaincu son ennemi, du joueur qui a gagné, du compétiteur qui est arrivé premier. C’est une émotion haute en adrénaline, grisante, mais intrinsèquement liée au conflit. On ne peut triompher que si quelqu’un d’autre perd. On ne peut se sentir supérieur que si quelqu’un d’autre est inférieur.
La joie, en revanche, est une émotion d’ouverture, de connexion, d’appréciation. Elle peut être partagée sans être diminuée — au contraire, elle augmente quand elle est partagée. Elle n’a pas besoin de comparaison ou de domination. Elle surgit de la beauté, de l’amour, de la connexion, du sens. Le pervers narcissique ne connaît pas cette joie. Son monde émotionnel est celui des émotions compétitives — triomphe, rage, mépris, envie — jamais celui des émotions de connexion — joie, tendresse, gratitude, amour.
La tension plutôt que la paix
Enfin, ce que le pervers narcissique recherche n’est pas la paix mais la tension. La paix — cet état de contentement tranquille, de satisfaction simple, de repos intérieur — lui est insupportable car elle le confronte au vide. Il a besoin de tension, de stimulation, de drame, de conflit pour se sentir vivant. C’est pourquoi il crée constamment des problèmes, des crises, des conflits même quand tout pourrait être paisible.
Quand la relation devient trop stable, trop prévisible, trop paisible, il la secoue. Il provoque une dispute, il introduit un élément de jalousie, il disparaît mystérieusement, il fait une scène. Cette tension artificielle lui procure la stimulation dont il a besoin. Mais vivre en état de tension permanente — créer ce drame constant, gérer ces crises multiples — est épuisant et empêche tout vraie relaxation, tout vrai repos, toute vraie paix. Peut-on vraiment être heureux sans jamais connaître la paix ?
La vraie souffrance est pour les victimes
Cesser de s’inquiéter pour lui
Comprendre la nature du « bonheur » (ou plutôt de son absence) chez le pervers narcissique ne devrait pas susciter votre compassion ou votre sollicitude — cela devrait vous libérer. La question « Est-il heureux ? » cache souvent un espoir secret (ou une crainte) : « Souffre-t-il autant que moi ? », « Mérite-t-il ma compassion ? », « Devrais-je l’aider ? »
La réponse est claire : vous n’avez aucune responsabilité envers son bonheur ou son malheur. Même s’il souffre réellement à sa façon (et c’est probablement le cas), cette souffrance n’excuse en rien la cruauté qu’il vous a infligée. Même s’il est prisonnier de sa structure narcissique (ce qui est vrai), vous n’êtes pas obligé de rester prisonnier avec lui. Sa souffrance éventuelle ne doit pas vous détourner de la reconnaissance de votre propre souffrance bien réelle et de votre besoin légitime de protection.
Pauline témoigne : « J’ai passé des années à me soucier de son bonheur, de sa santé mentale, de ses “blessures d’enfance”. Pendant ce temps, je me détruisais. Le jour où j’ai compris que je n’avais aucune obligation de le sauver, j’ai commencé à me sauver moi-même. »
Reprendre le centre de sa vie
Se demander si le pervers narcissique est heureux, c’est encore le maintenir au centre de votre univers mental. C’est accorder une importance démesurée à ses états internes, à son bien-être, à sa perception. La guérison commence quand vous vous recentrez sur vous-même : « Suis-je heureuse, moi ? », « Comment puis-je me reconstruire ? », « Qu’est-ce qui est bon pour moi ? »
Tant que vous vous préoccupez de son bonheur, vous restez dans une forme d’emprise résiduelle. Vous lui accordez encore de l’importance, du temps mental, de l’énergie émotionnelle. Le détachement véritable survient quand son bonheur ou son malheur vous devient fondamentalement indifférent — non pas par amertume ou vengeance, mais par désintérêt authentique. Il n’est plus votre problème. Sa vie intérieure n’est plus votre affaire. Vous êtes enfin libre de vous reconstruire sans vous soucier de lui.
La vraie question
La vraie question n’est pas « Est-il heureux ? » mais « Pourquoi cette question m’obsède-t-elle ? » Qu’est-ce que cette préoccupation révèle sur votre processus de guérison ? Souvent, elle révèle un besoin persistant de justice, un espoir secret qu’il regrette et revienne, une culpabilité résiduelle, une difficulté à accepter qu’il vous a fait du mal sans remords, ou un dernier fil d’emprise.
Identifier ce qui sous-tend cette question vous permet de travailler sur le véritable enjeu plutôt que de vous perdre dans des spéculations sans fin sur sa vie intérieure. Car au final, même si vous aviez une réponse définitive à la question « Est-il heureux ? », cela changerait-il quoi que ce soit à votre propre chemin de guérison ? Non. Votre libération ne dépend pas de son état — elle dépend uniquement de votre capacité à vous en détacher complètement. Attention toutefois au syndrome de stress post-narcissique qui peut prolonger ces ruminations.
Conclusion : une question qui en dit long
Alors, le pervers narcissique est-il heureux ? La réponse dépend entièrement de ce qu’on entend par « heureux ». Si par bonheur on entend l’excitation du triomphe, la satisfaction de l’ego, le plaisir de la domination, alors oui, il connaît des moments qu’il pourrait qualifier de « bonheur ». Si par bonheur on entend la paix intérieure, la connexion authentique, la joie simple d’exister, l’appréciation de la beauté, la gratitude, la sérénité — alors non, décidément non, le pervers narcissique n’est pas heureux.
Mais plus important encore : cette question elle-même révèle souvent que vous n’êtes pas encore complètement libre de son emprise. Tant que son bonheur (ou son malheur) vous importe, tant que vous y pensez, tant que cela occupe votre espace mental, vous lui accordez encore du pouvoir sur vous. La vraie libération survient quand cette question ne se pose plus — quand son état interne vous est devenu aussi indifférent que celui d’un parfait inconnu croisé dans la rue.
Ce détachement ne se force pas — il vient progressivement, à mesure que vous vous reconstruisez, que vous retrouvez votre propre centre, que vous remplissez votre vie de relations authentiques et de sens. Un jour, vous réaliserez que vous n’avez pas pensé à lui depuis des semaines. Que la question de son bonheur ne vous a même pas effleurée. Ce jour-là, vous saurez que vous êtes vraiment libre.
En attendant, rappelez-vous ceci : vous n’avez aucune responsabilité envers son bonheur. Vous n’avez jamais pu le rendre heureux, non pas parce que vous étiez insuffisant, mais parce qu’il ne recherchait pas le bonheur que vous pouviez offrir. Et vous ne pouvez pas le « sauver » de son mode de fonctionnement narcissique — lui seul pourrait entreprendre ce travail, et statistiquement, il ne le fera jamais. Votre seule responsabilité est envers vous-même : vous protéger, vous guérir, vous reconstruire, et peut-être un jour, retrouver votre propre capacité au bonheur authentique — celui qui lui restera à jamais inaccessible.
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Le pervers narcissique souffre-t-il vraiment ou fait-il semblant pour manipuler ?
Le pervers narcissique souffre probablement à sa façon, mais cette souffrance est très différente de ce que vous imaginez. Il y a la blessure narcissique fondamentale — cette honte profonde constamment réactivée par tout ce qui menace son image grandiose. Il y a aussi la souffrance liée au vide existentiel, cette sensation de ne jamais être « assez » malgré tous ses efforts. Cependant, cette souffrance n’est pas une souffrance relationnelle ou éthique — c’est une souffrance d’orgueil. De plus, même quand sa souffrance est réelle, il l’instrumentalise souvent pour manipuler.
Pourquoi semble-t-il heureux avec sa nouvelle partenaire ?
Ce que vous voyez est la façade soigneusement construite. Si la nouvelle partenaire semble heureuse, c’est probablement qu’elle est encore dans la phase d’idéalisation où le PN déploie tout son charme. Vous aussi, vous étiez heureuse à ce stade. Cette phase finit toujours par se terminer. De plus, le PN a besoin de présenter une image de réussite — les photos sur les réseaux sociaux font partie de la performance narcissique et servent aussi à vous faire mal.
Est-ce qu’il regrette ce qu’il m’a fait ?
Non, il ne regrette probablement pas de la façon dont vous l’imaginez. Le regret authentique nécessite l’empathie, la responsabilité et l’humilité — des capacités fondamentalement incompatibles avec la structure narcissique. Ce qu’il peut ressentir, c’est une blessure narcissique (vous êtes partie, donc il a « perdu ») ou un manque pragmatique (vous remplissiez certaines fonctions). S’il exprime du « regret », c’est généralement du hoovering — une stratégie pour vous faire revenir.
Comment arrêter de me soucier de son bonheur ?
Reconnaissez d’abord que cette préoccupation fait partie de l’emprise. Pratiquez le redirigement conscient de l’attention vers vous-même. Travaillez sur la reconstruction de votre identité séparée de lui. Créez des barrières concrètes (no contact total). Pratiquez la compassion pour vous-même. Le détachement est un processus graduel — progressivement, il occupera de moins en moins d’espace dans vos pensées.
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