Une communication toxique ouvre la voie aux situations malaisantes, que ce soit à niveau social, familial ou professionnel. Entre confusion dans les messages et mauvaises interprétations, les malentendus s’installent et avec eux, les tensions.
Celles-ci peuvent se ressentir à niveau interne avec une sensation étrange et déroutante remettant en cause nos capacités de compréhension, ou à niveau externe avec une crispation des échanges entre les personnes.
Un pervers narcissique usera volontiers du pouvoir manipulatoire de ce mode d’expression, mais l’ennui, c’est que tout le monde est susceptible de porter une certaine nocivité dans sa façon de dialoguer, y compris envers les personnes aimées.
Apprenons donc à détecter les communications toxiques pour assainir les propos dits ou entendus.
Comment déceler la communication toxique ?
La communication toxique s’invite chez tout le monde et dans toutes les sphères sociofamiliales, car transmettre un message de façon claire et directe est bien moins évident qu’il n’y paraît.
Nocivité des échanges, tous coupables ?
Si vous avez déjà manifesté votre agacement envers votre conjoint en criant “C’est moi qui fais tout, toute seule, ici !” ou sur vos enfants en assénant aux quatre vents “J’en ai par-dessus la tête de vivre dans une porcherie !”, alors vous avez communiqué sur un mode toxique. Cette façon de s’exprimer rejoint l’agression passive, dans laquelle on fait savoir son mécontentement sans pour autant chercher à changer les choses par soi-même. C’est tout simplement placer des attentes sans les verbaliser et sans les assumer pleinement, ce qui engendre une grande frustration appelée à exploser tôt ou tard et dans des proportions souvent démesurées.
Du poison dans les échanges, quelles répercussions ?
Vos interlocuteurs, qui ne manquent pas de déceler votre frustration, en éprouvent du stress, voire de la culpabilité et un sentiment d’impuissance, tout en se sentant agressés. Ils vont donc répondre de diverses manières. Dans ces conditions, le ton peut vite monter et les réactions hostiles des uns envers les autres peuvent prendre de l’ampleur. Suivant les personnalités auxquelles vous avez affaire, la dispute peut éclater et s’envenimer, parfois jusqu’à donner prétexte à de la violence physique. Ou bien, dans un registre de non-confrontation, la personne qui s’est sentie visée peut se replier sur elle-même, coupant court à ce lien douloureux et restant seule avec sa détresse. Nous voyons bien dans tous les cas qu’il n’y a pas forcément une volonté de nuire, mais plutôt celle de se protéger chacun du comportement de l’autre. Or, c’est le poison dans le dialogue qui mène à tant de déboires émotionnels. C’est pourquoi il nous paraît essentiel de vous donner les clés pour une communication claire et directe. Mais avant cela, penchons-nous sur les situations dans lesquelles cette nocivité est provoquée sciemment.
La communication malsaine à visée manipulatoire
Les pervers narcissiques sont les maîtres de la communication toxique. Ainsi, ils utilisent volontairement :
- Les messages mixtes, c’est-à-dire ambivalents, qui vous laissent avec une impression de ne pas avoir compris précisément les attentes. En général, ils sont porteurs de plusieurs informations en même temps qu’on ne sait plus comment hiérarchiser ou interpréter. Par exemple, il y a la célèbre phrase des sites de rencontre “Je cherche une relation durable, mais je ne suis pas contre les expériences légères.”
- Les injonctions paradoxales qui donnent des ordres impossibles à réaliser, car ils portent dans leur énoncé une contradiction insoluble. Un ressenti de paralysie de l’action en découle chez le récepteur du message. Par exemple, cela pourrait être “Il faut remplir ce frigo vide, mais arrête de dépenser de l’argent”.
- Les inversions accusatoires qui vous placent dans la position de devoir prouver que vous n’êtes pas coupable, alors que la charge de la preuve revient en principe à l’accusateur. Par exemple “Je ne te crois pas que c’est à cause des embouteillages que tu es en retard”.
- Les sous-entendus et insinuations qui suggèrent une idée, afin de contraindre l’autre à une interprétation. C’est une façon de prêcher le faux pour connaître le vrai. La réaction pourra ensuite être retournée contre l’autre. Par exemple : “Comme par hasard, tu mets ta jolie robe pour sortir sans moi”. Ce à quoi l’interlocutrice pourra répondre qu’il n’y a pas lieu d’être jaloux. Le manipulateur sentimental se fera alors un plaisir de renverser la situation en affirmant “Si tu penses que je suis jaloux, c’est que tu n’as pas l’esprit tranquille !”.
- Les menaces suspendues, c’est-à-dire que l’on pourrait ponctuer de trois petits points pour que l’imaginaire s’emballe et maintienne le récepteur du message inachevé dans la crainte. Exemple : “Si tu continues, tu verras ce qu’il va t’arriver…”.
Ici, il est évident que le but de ces manipulations verbales est d’entretenir le gaslighting qui provoque de nombreux conflits psychiques chez la personne qui reçoit ces types de phrases. Pour les PN, c’est donc un jeu qui contribue à maintenir leur emprise sur leur proie.
Comment assainir le dialogue (et contrer les tentatives d’enfumage) ?
Assainir le dialogue, c’est lever les doutes et ne laisser aucune place à l’interprétation. Ainsi, si la toxicité tente de s’installer, que celle-ci soit consciente ou inconsciente, elle sera rapidement détectée.
Les 4 niveaux de clarté de la communication
Selon la théorie de la communication menée par Paul Watzlawick, il y existe 4 types de messages, du moins précis au plus intelligible :
- Non clair indirect : il n’y a pas de demande précise ni d’adressage identifiable. Exemple : “J’en ai marre de faire la cuisine tous les soirs”.
- Non clair direct : il n’y a pas de demande précise, mais un adressage à quelqu’un d’identifié. Ex : “Chéri, il faudrait m’alléger un peu le soir”.
- Indirect clair : la demande est formulée, mais non adressée à quelqu’un en particulier. Ex : “J’ai besoin qu’on m’aide en cuisine”.
- Direct clair : La demande est précise et adressée à quelqu’un d’identifié. Ex : “Chéri, j’ai besoin que tu fasses la cuisine un soir sur deux.”
Parvenir à énoncer le message sans ambiguité et à l’adresser à la personne concernée est donc le moyen le plus efficace pour se faire bien comprendre. Mais que faire quand l’interlocuteur ne cherchait pas forcément à être spécifique ?
Les 4 conditions pour un message limpide
La meilleure solution pour parvenir une communication saine, c’est de réunir 4 éléments :
- un émetteur du message
- un message
- un récepteur du message
- un contexte dans lequel le message s’inscrit.
Si une seule de ces conditions manque, le message ne sera pas reçu dans toute sa dimension et risque d’être fragilisé par des interprétations hasardeuses. Ainsi, dire à un enfant : “Lucas (récepteur), je (émetteur) souhaite que tu m’expliques pourquoi tu as eu une mauvaise note (demande) à ton dernier contrôle de math (contexte)” facilite le dialogue.
À l’inverse, lui dire n’importe laquelle de ces propositions peut générer du conflit :
- Proposition 1 : “Lucas, tu ne vas pas décrocher à l’école tout de même !” Il n’y a ni message clair ni contexte de compréhension.
- Proposition 2 : “Encore un qui ne va pas faire math sup’ !” Il n’y a ni message, ni contexte, ni récepteur identifié.
Savoir identifier des lacunes dans la composition de l’information à transmettre fluidifie les échanges, mais lorsque vous êtes le récepteur d’un message confus, comment inciter l’émetteur à préciser son propos ? Il suffit de lui poser les bonnes questions. Dans les grands principes, cela donnerait :
- À qui est adressé ce message ?
- De qui émane cette demande ?
- Quel est le souhait pour remédier au problème ?
- À quel contexte faut-il faire référence ?
Dans une situation transposée au couple, cela pourrait ressembler à ce dialogue fictif :
Émetteur :
– “J’en ai marre des gens qui se plaignent tout le temps !”
Récepteur :
– “Est-ce à moi que tu t’adresses ou à quelqu’un d’autre ?”
– “À quelle occasion as-tu entendu une plainte ?”
– “Qu’attends-tu de moi ?”
Suivant les réponses fournies à ces questions limpides et le comportement de votre interlocuteur, y compris son langage corporel, vous verrez s’il y a là une tentative de manipulation ou non. Si c’est le cas, c’est qu’il n’y a rien à comprendre et surtout, rien à vous reprocher. Coupez court à la conversation et ne gardez en vous aucune sensation désagréable de cet échange qui n’avait rien de constructif.
La communication toxique est à l’origine de bien des discordes dans le couple, mais aussi dans la famille, les amitiés ou le travail. En apprenant à composer un message clair et directement adressé aux personnes concernées, vous assainissez non seulement votre propre façon de formuler vos demandes, mais vous apprenez aussi à déceler les tentatives de déstabilisation par la parole. Maîtriser les mots dits et entendus donne un pouvoir considérable. Saisissez-le !