L’amour conditionnel du PN : la négociation de l’affection

“Je t’aimerais davantage si tu changeais pour moi”. “Si tu faisais plus d’efforts, je n’aurais plus de doute sur notre avenir commun”. Les relations faites de “si” reposent sur la promesse d’un futur hypothétique dépeint comme bien meilleur que la situation actuelle. En véritable art de la négociation des marques de tendresse, l’amour conditionnel du PN est un principe de base de son mode d’interaction avec autrui. Toutefois, cette dynamique qui diffère du chantage affectif s’instaure à deux. Pour qu’il y ait marchandage des sentiments et de l’attention, il faut qu’il y ait un vendeur et un acheteur. Voyons comment les relations affectives conditionnelles se dissocient dangereusement du pur sentiment amoureux.

Qu’est-ce que l’amour inconditionnel ?

Pour comprendre l’amour conditionnel du PN, il est nécessaire de saisir ce que représente l’amour inconditionnel. Il s’agit d’un type d’affectivité exempt de toute forme de dépendance ou d’attentes. Ainsi, ce ne sont pas les actions, les comportements, ni même les caractéristiques d’une personne qui la rendent éligible au sentiment amoureux, c’est son être tout entier.

L’amour sans concession, une utopie ?

Comme une sorte d’idéal à atteindre, on envisage l’amour inconditionnel dans une acceptation totale de ce qui constitue l’identité de la personne aimée. Sans ignorer ses faiblesses ou ses imperfections, sans chercher à la changer, les sentiments qu’on lui porte ne faillissent pas, même en cas d’attitude décevante, si cela reste passager et pardonnable, bien entendu. Cette vision peut paraître édulcorée et pourtant, il est bel et bien possible d’aimer sans conditions. Dans la pratique, cela nécessite une certaine maturité émotionnelle et une réelle envie de prendre soin de la relation.

L’apprentissage du lien affectif dès l’enfance et son évolution

L’exemple le plus souvent cité dès lors que l’on aborde le sujet de l’amour sans condition est celui que la plupart des mères portent à leur enfant. Envers et contre tout, on aime la personne pour une durée indéterminée. Cette comparaison est importante, car elle crée le rapport à la théorie de l’attachement qui va nous permettre d’expliquer les dysfonctionnements des liens amoureux. L’inconditionnalité du lien affectif procure une base émotionnelle saine et sécurisante pour tout individu. Elle porte autant sur le mode relationnel à autrui que l’amour que l’on s’accorde à soi-même. Ainsi, sans savoir si l’on dispose d’une estime de soi convenable (ce qui peut se vérifier grâce à notre test en ligne gratuit), il sera difficile de faire l’expérience d’un amour inconditionnel. Par contre, une situation de dépendance affective, véritable aimant à pervers narcissiques, sera tout à fait possible et pourra déboucher sur une mise sous emprise.

Inconditionnel sans être soumis

Ce portrait idyllique étant fait, il convient de préciser que l’amour sans concession ne vous oblige pas à tout accepter pour autant. C’est même l’inverse. Parce que l’affection est sincère, solide et durable, elle pose le socle d’un échange fructueux dans lequel la communication est primordiale. Dans la sécurité de cet espace bienveillant, il est alors possible d’aborder les sujets qui fâchent, afin d’y remédier ensemble. Dans le couple, si un comportement s’est avéré blessant pour l’un des deux partenaires, il est important de verbaliser son ressenti. Cela donne une chance à l’autre d’ajuster sa manière d’entrer en relation avec son conjoint. C’est avec ce genre d’efforts de communication non violente que l’on construit une union solide.

L’Amour sous condition dans la manipulation sentimentale

Maintenant que la base de relation affective saine est posée, et tout en convenant que les échanges interindividuels ne se font pas tous sans frictions, penchons-nous sur l’amour conditionnel.

Amour conditionnel et chantage affectif : quelles différences ?

L’amour conditionnel fait entrevoir la possibilité d’une amélioration d’une situation (souvent pénible, mais pas nécessairement reconnue en tant que telle) dans la mesure où l’autre partenaire va assumer la mise en place des actions présentées comme requises, sous peine d’une diminution ou d’un retrait d’affection à terme. Comparable à une sorte de “carotte émotionnelle”, cela fonctionne par conditionnement, de la même manière que l’impuissance apprise.

Le chantage affectif va fonctionner comme une menace en tant que technique manipulatoire. Le MPN tente alors d’obtenir ce qu’il veut en utilisant les émotions de l’autre en tant que moyen de pression. Il y a également des “si” chantagistes, mais plutôt dans le but de créer un faux effet de causalité. Par exemple : “Si tu ne changes pas, je te quitterai”, “Si tu me trompes, je te tuerai”, “Si tu pars, tu ne verras plus les enfants”. Le chantage sonne comme une annonce, la pose d’un interdit, tandis que l’amour conditionnel fonctionne comme une promesse, la motivation à redoubler d’énergie. Par exemple : “Si tu fais toujours ce que je veux, je t’aimerai davantage”, “Je t’aime quand tu te conduis de la façon que je souhaite”, “Si tu atteins tel objectif, notre amour sera plus fort”, “Je ne t’aimerai que si tu réponds à mes attentes.”

En d’autres termes, ce qui est présenté comme de l’amour est octroyé seulement en fonction de la capacité de l’autre à satisfaire les demandes du conjoint tyrannique.

Quel est le rôle de la victime d’amour conditionnel du PN ?

Comme nous l’avons évoqué plus haut, pour qu’une discussion se joue sur la table des négociations affectives, il faut au moins deux participants. Ainsi, la promesse d’un amour plus grand “à condition que” doit trouver preneur, et c’est là que la victime de manipulation participe activement, mais sans le savoir, à ce manège. Voici les problématiques qui relèvent de l’acceptation de la proie et sur lesquelles il faudrait qu’elle travaille dans un processus thérapeutique :

  • La recherche d’approbation. Par ce biais, elle se met en position de faiblesse par rapport à celui qui détient l’objet de sa convoitise, c’est-à-dire l’amour. Elle se fie ainsi au jugement de quelqu’un qui veut la détruire. Ceci brouille sa capacité à évaluer les situations avec discernement.
  • L’adaptation permanente. Ce qui était à l’origine une qualité pour surmonter l’adversité devient ici une tare. À force d’ajuster son comportement aux exigences d’autrui, la proie prend sur elle en permanence. Ceci la conduit inexorablement vers une perte d’identité.
  • L’autoculpabilisation. En endossant à elle seule la responsabilité du bon fonctionnement de la relation, elle en assume aussi les travers. Pour le PN, c’est du pain béni que de faire croire à sa victime qu’elle est la cause de tous les malheurs. La culpabilité qu’elle s’inflige est si envahissante qu’elle peut mener à la psychosomatisation.
  • La dépendance émotionnelle. La dévalorisation de la victime du PN qui lui impose un amour conditionnel la rend dépendante émotionnelle de son bourreau. Ceci crée un cercle vicieux où son estime de soi repose entièrement sur la validation du manipulateur sentimental.
  • Le renoncement à poser ses limites. Lorsque l’effraction régulière des barrières psychiques de la victime la mène à accepter les pires abus, cela revient à renoncer à soi. On est alors proche de l’anéantissement final tant espéré par le MPN.

Toutes ces problématiques découlent d’une faille narcissique qui a mené la victime à se connecter à autrui par besoin, plus que par envie. C’est parce qu’elle n’a pas fait l’expérience d’un amour inconditionnel suffisamment solide qu’elle en vient à confondre l’amour avec la dépendance affective.

L’amour conditionnel du PN résonne avec sa tendance à réifier, c’est-à-dire chosifier autrui. Ici, le sentiment amoureux, ou du moins l’illusion que l’on s’en fait, devient une monnaie d’échange, un moyen de parvenir à la satisfaction de ses désirs et besoins personnels. Quant à la victime, il faut qu’elle se rende compte que cette promesse d’une attention plus affectueuse n’a rien à voir avec le véritable amour. Au risque de paraître quelque peu ingénu, l’amour ne se commande pas, ni ne se calcule ou ne se dose. Il n’est pas soumis à un cahier des charges et repose sur un grand altruisme dont les pervers narcissiques ne seront jamais capables.

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