À QUI PARLER DU PERVERS NARCISSIQUE ? AVEC QUI SE TAIRE ?

Découvrir que votre bourreau est un manipulateur sentimental a été une révélation. Vous vous êtes sentie bernée pendant si longtemps que vous avez envie de crier sur tous les toits cette vérité désormais implacable. Ce serait même un devoir d’ouvrir les yeux de votre entourage, afin que plus personne ne se fasse avoir par les numéros de charme de cet être nuisible. Malheureusement, la violence qu’il vous a infligée, vous êtes probablement la seule à le connaître, ce qui fait que votre découverte ne paraîtra pas si évidente à accepter pour tout le monde. Alors à qui parler du pervers narcissique ? Mais surtout, avec qui se taire ? En quoi vos confidences pourraient-elles vous causer du tort ? C’est ce que nous allons vous expliquer.

Pourquoi parler de perversion narcissique n’a rien d’anodin ?

La notion de perversité narcissique divise l’opinion publique, mais aussi les chercheurs. De plus, elle dit aussi quelque chose du caractère de la victime. C’est pourquoi il faut être prudent, car parler revient autant à exposer le malfaiteur qu’à s’exposer soi-même.

La polémique terminologique et ce qu’elle engendre

Certains psychologues n’hésitent pas à rejeter l’expression, trouvant qu’il y a une antinomie entre les mots “perversion” et “narcissisme”. Pourtant, le phénomène est vaste et prend chaque année plus d’ampleur. Les médias en parlent massivement et les témoignages de victimes sont si nombreux que les mauvaises langues l’apparentent à une tendance à la mode, diminuant par-là même sa dangerosité.
Notre positionnement depuis plus de 10 ans, avec la sortie de l’ouvrage La manipulation affective dans le couple – Faire face à un pervers narcissique est le même : peu importe l’appellation que l’on donne à ce type de profil, il existe bien une psychopathologie qui consiste à perpétrer des abus émotionnels à autrui dans un but destructeur.

Ainsi, si le débat sur la désignation de cette personnalité pathologique peut-être considéré comme légitime, il pose toutefois 2 problèmes : d’une part, il déplace l’attention sur la forme alors que le fond mérite encore d’être exploré ; d’autre part, il sert d’ancrage aux sceptiques et aux contestataires pour réfuter l’existence du phénomène.

De fait, lorsque vous vous mettrez à parler de votre vécu avec un PN et que vous utiliserez cette expression, vous avez de grandes chances que l’on vous réponde “Mais les pervers narcissiques sont une invention des médias pour faire du buzz !” Et encore, cette situation serait la moins pénible. Le pire serait probablement de sentir le malaise de la personne en face de vous qui ne rétorque rien, mais dont le visage traduit le rejet de vos dires, sans oser l’affirmer. Dans tous les cas, sachez que le fait de ne pas être crue constitue une 2e sentence pour une victime. C’est une situation extrêmement déstabilisante psychologiquement parlant, et qui tend à aggraver le vécu traumatique. Évitez de vous infliger cette double peine et choisissez bien les confidents à qui parler du PN en toute sécurité, grâce à nos conseils.

Le jugement sous-jacent de la victime

Malheureusement, en déclarant que votre opposant possède un caractère toxique, votre parole sera mise en doute et cela ouvre la porte au jugement sur vos intentions et surtout, sur votre personnalité. En effet, vous risquez d’être examinée sous un nouveau jour et ne pourrez éviter les questions de type : “Pourquoi n’en parler que maintenant ?” ou le si fréquent et culpabilisant “Comment se fait-il que TOI, tu te sois retrouvée sous emprise ?”

Eh oui, nous savons que les proies favorites des MPN sont les femmes brillantes, empathiques et généreuses, alors comment les imaginer manipulables ? Et comme toute la maltraitance se passe à huis clos, personne n’a rien vu, d’autant plus que vous avez à coup sûr participé à entretenir l’illusion d’une relation saine.

Bref, le choc de la révélation mènera vos interlocuteurs à se poser des questions sur vous. “Qui êtes-vous ?” ; “Pourquoi leur avoir menti sur votre situation ?” ; “Comment savoir si vos dires ne sont pas de nouveaux mensonges ?” En d’autres termes, vous serez quasiment forcée de dévoiler votre plus grande faiblesse : votre dépendance affective. Votre image sera, elle aussi, écornée et pour que le regard soupçonneux de votre entourage ne vous fragilise pas davantage, il vaut mieux réserver ces explications à quiconque est réellement en capacité de comprendre votre propre faille narcissique et surtout, ne sera pas tenté non plus de l’utiliser à son tour, à son avantage.

Passage en revue des personnes à qui une victime est tentée de parler du MPN

Bien entendu, chaque individu est différent et avant de vous donner quelques exemples types de personnes à qui vous confier ou au contraire, avec qui vous taire, il vous appartiendra de vous interroger au cas par cas. Pour ce faire, il vous faudra évaluer le degré d’ouverture d’esprit de votre interlocuteur, sa bienveillance envers vous, sa connaissance en matière de psychologie et, par-dessus tout, ses rapports personnels avec le manipulateur sentimental.

À qui parler du PN et avec qui se taire au sein du foyer

Si vous ne viviez pas sous le même toit que le PN (par exemple parce que votre bourreau est votre patron), les personnes partageant votre foyer (enfants, parents, frère et soeurs, colocataires, etc.) ont certainement assisté à votre dépérissement. S’ils semblent sincèrement inquiets pour vous et qu’ils sont assez matures pour comprendre la toxicité d’une relation, vous pourrez commencer à dévoiler certains des agissements de votre tortionnaire. Tâtez le terrain en révélant quelques anecdotes sur son comportement pour voir comment réagit votre confident. S’il est révolté par ce qui vous arrive et vous témoigne son soutien, alors vous pourrez aller progressivement plus loin dans le partage sur votre vécu. S’il s’agit de mineurs encore trop immatures pour saisir la complexité de tels enjeux, ne leur cachez pas la vérité, mais axez votre discours sur votre mal-être en utilisant un vocabulaire adapté à l’âge, tout en rassurant les plus jeunes sur le fait que rien n’est de leur faute et qu’ils sont aimés. Pour en savoir plus sur ce sujet, consultez nos 3 règles d’or pour expliquer la situation aux petits.

Si par contre, vous partagez votre habitat avec un PN, qu’il s’agisse de votre conjoint, de votre mère, de votre père ou beau-père, etc., n’abordez surtout pas le sujet avec lui. De même, réservez les discussions à ce propos avec d’autres personnes en dehors du foyer. On ne sait jamais, certains sont si machiavéliques qu’ils sont capables d’espionner vos conversations, même lorsque vous les pensez à distance.

Se confier au reste de la famille

Votre famille est censée vous soutenir quoi qu’il arrive, mais cette vision idyllique des liens du sang ne constitue malheureusement pas une généralité. Êtes-vous certaine que votre famille n’est pas tombée sous le charme séducteur du manipulateur sadique ? Vos conflits passés sont-ils suffisamment anciens ou résolus pour que les vieilles jalousies et rancœurs soient enterrées ? Méfiez-vous de l’aubaine que représente votre fragilité pour certaines personnes mal intentionnées, même si vous les côtoyez depuis l’enfance…

Parler à la famille du PN

Dévoiler votre découverte à la famille du PN est, au même titre qu’à lui, une idée à proscrire à tout prix. Dites-vous bien que sa pathologie lui vient du plus jeune âge et qu’elle implique un “incident” de l’attachement. Autrement dit, parler à votre belle-famille d’un problème dont elle est très vraisemblablement la source ne vous apportera rien d’autre que du déni et des animosités supplémentaires. 

Chercher  une écoute auprès d’amis

Les amis sont en général les plus à même de vous réconforter lorsque vous leur parlerez de l’enfer de votre quotidien avec un PN. Toutefois, vous aurez plus de chances que cela vous aide si vous vous connaissez de longue date (c’est-à-dire avant votre rencontre avec le manipulateur sadique) et qu’ils veulent réellement votre bonheur. Évitez d’essayer de recruter du soutien auprès des amis du PN, c’est peine perdue, et même de la part des gens que vous fréquentiez en commun, car comme nous l’avons déjà expliqué, ils tendent à prendre parti pour lui.

Expliquer son vécu au travail

D’une façon générale, il n’est pas de bon ton de révéler des aspects trop personnels de sa vie au travail. La frontière entre le professio nnel et le privé est déjà suffisamment perméable pour que, sans le vouloir, l’un affecte l’autre. Mais bien souvent, réussir à cloisonner ces 2 aspects est salvateur. Ainsi, si vous éprouvez des difficultés dans votre sphère personnelle, le travail peut vous maintenir à flot. De même, si c’est votre emploi qui vous cause de la souffrance, un foyer équilibré peut vous aider à surmonter l’épreuve. Veillez bien à ce que jamais l’on puisse imputer une baisse de performance à des tracas personnels. C’est un engrenage qu’il est très difficile d’arrêter. Par contre, si votre PN est un manager, vous aurez besoin de vos collègues pour le confondre. Ne cachez rien de son comportement abusif et maintenez le lien avec les membres de votre équipe afin d’éviter la division, les rivalités et la mise à l’écart.

Révéler la perversion de votre bourreau à un juge

Si vous étiez mariée à un PN ou que vous avez des enfants en commun, votre séparation passera forcément par une audience devant un juge. Vous penserez alors qu’en révélant la nature perverse de votre ex, vous vous attirerez les faveurs des membres du tribunal. Grosse erreur à ne surtout pas commettre ! Les magistrats, surtout les JAF (juges aux affaires familiales) détestent les querelles de couple. Ils veillent en priorité au bien-être de l’enfant, mais c’est là qu’il y a un hic. Il est quasiment impossible de prouver la maltraitance mentale que vous avez subie et en attaquant votre ex, vous alimenterez sa propre stratégie : celle de vous faire passer pour une hystérique rancunière. Choisissez bien votre avocat et gardez-vous bien de demander une expertise psychologique de votre adversaire. Cela ne mènera probablement à rien puisqu’il saura se montrer sous son meilleur jour pour amadouer tout le monde et il rétorquera sûrement par une demande d’enquête sociale, souvent très anxiogène pour vous et vos enfants.

Il n’y a qu’un type d’interlocuteur à qui parler du PN qui garantit à coup sûr de ne pas vous porter préjudice : les professionnels de la santé mentale. Même si certains proches sont ralliés à votre cause et pourront vous aider, la menace de vous fragiliser davantage en expliquant votre vécu avec un manipulateur est réelle et doit être considérée avant de vous livrer. Confiez votre détresse à un thérapeute qualifié, que ce soit par le biais de la médecine du travail, d’une structure médico-sociale ou en consultation avec un psychologue libéral et vous saurez vous protéger des risques de révéler la vérité à qui ne veut pas l’entendre.

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