Lorsque l’on pense à sa première relation toxique, c’est le plus souvent une histoire d’amour tumultueuse qui nous vient en tête. Or, c’est une erreur d’appréhender cet événement comme un “accident de vie”. Un mode relationnel marqué par la manipulation émotionnelle et la dépendance affective puise ses racines bien plus tôt : dans le lien avec une figure parentale.
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Cela peut être une histoire d’amour, mais aussi un lien de contrôle coercitif au travail ou une amitié fusionnelle néfaste. Mais dans tous les cas, cette relation à l’âge adulte n’est pas la première.
Les racines sont plus profondes
Lorsqu’un parent ou assimilé impose contrôle et domination ou échoue à assurer le besoin de sécurité de l’enfant, des blessures profondes peuvent se créer dans sa psyché. Le plus grave, c’est qu’un mineur chez qui l’on a engendré une faille narcissique n’en prend conscience que bien plus tard, si toutefois il y parvient.
Votre première relation délétère n’est pas celle vécue à l’âge adulte avec un pervers narcissique. Voyons plus grand et observons le continuum de votre parcours pour faire la genèse de cette problématique et vous aider à vous libérer du schéma de victime.
Le développement des schémas précoces inadaptés
Ce que l’on identifie comme la première relation toxique à l’âge adulte découle d’une problématique psychologique non résolue. Notre rapport aux autres, primordial depuis notre plus tendre enfance, constitue le socle de notre mode relationnel et des comportements qui en émanent.
S’il n’a pas été de bonne qualité, que l’on en ait conscience ou pas, il a conditionné notre fonctionnement. Un retour en arrière introspectif peut expliquer la plupart de nos conflits psychiques actuels.
La faille narcissique provoquée par les premiers abus émotionnels
La faille narcissique est occasionnée par les premiers abus émotionnels subis durant l’enfance. Elle se forme lorsqu’un enfant ne reçoit pas l’amour, le respect ou l’attention nécessaires lui permettant de développer une bonne estime de soi.
Ces blessures narcissiques peuvent être causées par n’importe qui : parent, figure d’autorité, pairs… Elles incluent :
• Le rejet
• L’abandon
• L’humiliation
• La négligence
• L’invalidation émotionnelle
En grandissant, ces failles créent un terrain fertile pour la dépendance affective et la quête de validation extérieure, rendant l’adulte vulnérable aux relations manipulatoires.
Les troubles de l’attachement à l’origine de la dépendance affective
Les troubles de l’attachement théorisés par John Bowlby découlent souvent de relations parentales marquées par le rejet, la négligence ou l’instabilité, ce qui laisse une empreinte indélébile.
En grandissant, les jeunes développent un besoin constant de validation et de sécurité auprès des autres, conduisant à des dynamiques relationnelles dysfonctionnelles. Ce besoin intense d’affection et de réassurance peut les amener à accepter la mise sous emprise par une personnalité narcissique perverse, car la peur de se retrouver seul domine.
Les différents styles d’attachement
Un style d’attachement sain ou sécure nourrit la confiance en soi pour encourager l’autonomie, tandis qu’un attachement insécure peut mener à :
• Des conduites d’évitement
• De l’anxiété relationnelle
• Des comportements désorganisés, c’est-à-dire chaotiques
C’est notamment ce qui permet à un PN de faire passer sa victime pour folle.
Les schémas relationnels inadaptés conservés à l’âge adulte
Les schémas précoces inadaptés (SPI) proposés par Jeffrey Young et forgés dans l’enfance persistent souvent à l’âge adulte, particulièrement chez les personnes ayant subi des abus émotionnels ou un attachement insécurisant.
Ces schémas sont formés par les croyances, les perceptions, les expériences vécues et les émotions propres à chaque individu. Ce sont des constructions représentatives d’une certaine vérité subjective. Plus elles sont éloignées de la réalité et plus elles sont dysfonctionnelles.
Les cinq catégories de schémas inadaptés
Jeffrey Young a répertorié ces schémas en cinq catégories :
1. Les carences du lien d’attachement : sentiment d’abandon, méfiance, manque affectif, exclusion sociale
2. Le manque d’autonomie et de performance : dépendance, vulnérabilité, échec, fusion
3. Le manque de limites : sentiment de supériorité, manque de contrôle de soi
4. La dépendance aux autres : assujettissement, abnégation, recherche d’approbation
5. L’hypervigilance ou l’inhibition : négativité, contrôle émotionnel excessif, exigences élevées, punition
Maintenir ces schémas à l’âge adulte conduit la personne à se conformer inconsciemment à des rôles ou à des attentes de la sphère sociale. Elle est donc plus vulnérable à l’emprise émotionnelle.
Quels types de parents peuvent provoquer une première relation toxique ?
Puisque la première relation interpersonnelle se noue avec les figures parentales, il est utile de s’interroger sur leur part de responsabilité sur les conduites problématiques de leur enfant.
En psychothérapie, la prise de conscience de la dimension humaine et donc imparfaite de ses parents constitue fréquemment un tournant dans la libération des schémas relationnels destructeurs.
Les parents bien intentionnés qui exercent une forme d’abus sans le vouloir
Les parents qui, sans intention malveillante, utilisent la violence éducative ordinaire (VEO) par méconnaissance du sujet peuvent causer malgré eux des blessures affectives durables.
La VEO inclut des pratiques telles que :
• La punition
• L’invalidation émotionnelle
• La contrainte
• Le chantage affectif
Ces pratiques, souvent perçues comme formatrices, érodent en réalité l’estime de soi et l’attachement sain chez l’enfant. Ce genre de démarche amène les mineurs à se sentir incapables de se prendre en main et les déconnecte de leurs aspirations profondes.
Les parents toxiques sans être pervers
Certaines figures d’attachement ont recours épisodiquement à des attitudes néfastes pour leur progéniture sans le vouloir. D’autres sont carrément des parents toxiques qui s’ignorent et sans être nécessairement manipulateurs ou narcissiques pathologiques.
Souvent inconscients de l’impact de leurs comportements, ils peuvent faire usage de :
• La parentification (l’enfant devient le parent du parent)
• Une autorité trop stricte ou trop laxiste
• Des attentes irréalistes
• Une projection de leurs propres insécurités
• Tout autre procédé entravant l’autonomie de l’enfant
Ces attitudes, bien que n’affichant pas d’intentions malveillantes, peuvent produire des effets encore pires que le machiavélisme. En effet, comment en vouloir à quelqu’un d’avoir mal éduqué son enfant s’il a cru en toute bonne foi faire de son mieux ?
Les parents pervers narcissiques
Un père ou une mère ayant des traits de perversion narcissique cause divers dégâts psychologiques sur ses enfants :
• Les chosifier en faire-valoir
• Semer la discorde dans la fratrie
• Les aliéner contre leur autre parent
• Instaurer un climat incestuel
• Les dévaloriser constamment
• Les instrumentaliser dans les conflits conjugaux
Difficile d’imaginer une construction identitaire équilibrée pour ces jeunes mineurs.
Les séquelles durables
Si l’enfant victime d’abus émotionnels ne devient pas lui-même un futur PN, il souffrira immanquablement des séquelles des nombreuses effractions psychiques de ses premières années dans un foyer toxique.
Si vous êtes vous-même enfant de vampire émotionnel et que vous n’avez pas repris le flambeau funeste de la destruction d’autrui, votre salut contre de nouvelles situations d’emprise sera dans l’accompagnement thérapeutique avec un psy qui connaît par cœur ces problématiques.
Comment identifier ses propres schémas
Reconnaître les schémas qui vous rendent vulnérable est la première étape vers la libération.
Les questions à se poser
• Quels comportements répétez-vous dans vos relations ?
• Quelles émotions vous submergent face au conflit ou à l’abandon ?
• Comment réagissiez-vous enfant face aux attitudes de vos parents ?
• Quelles croyances avez-vous sur vous-même et sur les autres ?
• Quels besoins non satisfaits cherchez-vous à combler dans vos relations ?
Les signaux d’alerte
• Vous attirez toujours le même type de partenaires
• Vous avez une peur intense de l’abandon
• Vous acceptez des comportements inacceptables par peur de la solitude
• Vous vous sentez responsable des émotions des autres
• Vous avez du mal à poser des limites
Se libérer des schémas hérités
Comprendre que votre première relation toxique ne réside pas nécessairement dans une histoire amoureuse décevante, mais plutôt dans votre lien avec une figure parentale maladaptée est crucial pour accéder à la résilience.
Le travail thérapeutique
Ces premières interactions posent souvent les bases de schémas de dépendance affective et de comportements interpersonnels dysfonctionnels qui se répètent à l’âge adulte de manière indéfinie.
Identifier et analyser ces blessures originelles, que ce soit des failles narcissiques ou des troubles de l’attachement, permet de reprendre la main sur ses relations.
Ce que la thérapie peut apporter
• Identifier les schémas précoces inadaptés
• Comprendre leur origine
• Reconnaître les déclencheurs actuels
• Développer des réponses alternatives
• Reconstruire une estime de soi saine
• Établir des limites claires
Conclusion : regarder en arrière pour avancer
Votre première relation toxique n’est probablement pas celle que vous croyez. Elle remonte plus loin, à ces interactions fondatrices avec vos figures parentales qui ont modelé votre façon d’être en relation.
Reconnaître ces racines fragiles n’est pas accuser ni blâmer. C’est comprendre pour ne plus répéter. C’est identifier les failles pour les colmater, les schémas pour les transformer.
En reconnaissant ces racines, vous ouvrez la voie à des interactions plus saines et épanouissantes. Le passé explique, mais il ne condamne pas.
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FAQ : Questions fréquentes sur la première relation toxique
Comment savoir si ma relation toxique actuelle vient de mon enfance ?
Si vous répétez toujours les mêmes schémas relationnels (attirer le même type de partenaires, accepter les mêmes comportements inacceptables, ressentir les mêmes émotions), c’est probablement que des schémas précoces inadaptés se rejouent. Observez si vous cherchez inconsciemment à “réparer” une blessure d’enfance à travers vos relations adultes, ou si vous reproduisez une dynamique familiale connue.
Mes parents étaient-ils des pervers narcissiques ou juste maladroits ?
La différence réside dans l’intentionnalité et la systématicité. Des parents maladroits peuvent blesser par ignorance ou mauvaise éducation, mais ils sont capables de remise en question et d’excuses sincères. Un parent pervers narcissique manipule consciemment, ne reconnaît jamais ses torts, inverse systématiquement la culpabilité et utilise son enfant comme objet. L’impact traumatique est également différent en intensité et en profondeur.
Peut-on guérir des blessures de sa première relation toxique ?
Oui, avec un travail thérapeutique adapté. Identifier les schémas précoces inadaptés, comprendre leur origine, reconnaître leur manifestation actuelle et développer des réponses alternatives permet de se libérer progressivement. La thérapie aide à reconstruire une estime de soi saine, à établir des limites claires et à choisir des relations épanouissantes. Le passé explique mais ne condamne pas.
Vais-je reproduire les mêmes erreurs avec mes enfants ?
Pas nécessairement, si vous en prenez conscience. La prise de conscience de vos propres blessures et un travail thérapeutique sont les meilleurs remparts contre la répétition transgénérationnelle. Beaucoup de personnes ayant souffert dans leur enfance deviennent au contraire des parents très attentifs et bienveillants, précisément parce qu’elles ont compris ce qu’il ne fallait pas reproduire.