Le conflit de loyauté de l’enfant consiste à le placer dans une situation inextricable dans laquelle il est amené de façon plus ou moins subtile à trahir l’un de ses parents pour favoriser l’autre. C’est malheureusement courant en cas de séparation conflictuelle. Bien entendu, la rupture avec un pervers narcissique ne pouvant en aucun cas se passer sereinement, le parent toxique n’hésitera pas à instrumentaliser sa progéniture. Il jouera sur le dilemme moral de ses petits pour garder une emprise sur sa proie.
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Faire le test maintenantLe conflit de loyauté chez les enfants : origine et risques
En cas de mésentente notoire de parents séparés, l’enfant ou l’adolescent qui est témoin (et parfois partie prenante) des disputes et autres violences est tiraillé. Il est censé aimer de façon inconditionnelle ses deux figures protectrices, mais comment peut-il le faire sereinement si leur haine mutuelle est vécue au grand jour ?
Qu’est-ce qui crée le conflit de loyauté chez les enfants ?
Lorsqu’un couple se sépare dans la douleur, c’est souvent symptomatique du fait que l’un des deux n’est pas prêt à laisser partir l’autre. Il se sent abandonné, trahi, voire humilié et cherche réparation. Il attise ainsi la colère comme pour pallier l’absence de l’ex-conjoint, en entretenant un lien dans la rancune.
En même temps, l’affront ressenti pousse l’amant rejeté à s’accrocher à sa fonction de parent, comptant sur le lien filial indéfectible pour se renarcissiser partiellement. L’héritier du couple porte alors la lourde responsabilité de maintenir en vie ce qui n’est plus, comme s’il en était le dernier vestige.
Il permet également au parent en souffrance psychologique d’être rassuré sur l’inconnu de ce remaniement familial. Les rôles parentaux s’inversent ainsi dans un rapport vertical où c’est l’enfant qui est chargé d’endosser un rôle protecteur auprès de son ascendant, ce qui est un fardeau bien trop encombrant pour lui.
Les mécanismes psychiques en jeu
L’enfant pris dans un conflit de loyauté vit une situation de double contrainte. Quoi qu’il fasse, il a le sentiment de trahir. S’il exprime de l’affection pour l’un de ses parents, il craint de blesser l’autre. S’il rapporte ce qu’il a vécu chez l’un, il a l’impression de l’espionner. S’il prend du plaisir avec l’un, il se sent coupable vis-à-vis de l’autre.
Cette situation impossible génère une anxiété permanente qui épuise ses ressources psychiques. L’enfant développe une hypervigilance : il surveille constamment ses paroles, ses expressions, ses réactions, de peur de déclencher un conflit ou de décevoir.
Les dangers des loyautés clivées sur la psyché de l’enfant
Le modèle que les “grands” donnent à voir est déterminant pour la construction de la personnalité des petits. Le conflit des adultes se transpose en un dilemme interne chez l’individu immature, susceptible de provoquer de nombreux troubles psychiques, à plus ou moins longue échéance.
Là où les adolescents ou les mineurs plus matures auront parfois le réflexe salutaire de fuir les griefs entre leurs parents, d’autres s’en sortiront tant bien que mal en naviguant entre un adulte et l’autre. Ils épouseront tantôt la cause du père, puis celle de la mère afin de se préserver de toute pression. Cette alternance entre comportement loyal et déloyal nuira à leur propre cohésion.
En quelque sorte, l'”autorisation de trahir” en fil rouge de leur éducation pourra ouvrir la porte à de futures transgressions qui se manifesteront de diverses manières.
L’intériorisation du conflit
Mais plus l’enfant est jeune et fragile, plus il aura tendance à intérioriser le déchirement entre ses parents. C’est là que le conflit de loyauté prendra ses racines. Souvent, ces petits deviennent hypermatures et renoncent à leurs propres désirs. Mais il arrive aussi fréquemment qu’ils traversent une période de régression (avec énurésie ou comportement de bébé, par exemple), comme s’ils voulaient rétablir la situation antérieure.
Dans tous les cas, les divers symptômes qui découlent du conflit de loyauté manifestent un terrain propice à la dépression dans un futur plus ou moins proche. L’intervention d’un thérapeute pourra alors s’avérer indispensable.
Les signes du conflit de loyauté chez l’enfant
Reconnaître les manifestations du conflit de loyauté permet d’intervenir avant que les dégâts ne deviennent trop importants.
Les signes comportementaux
• Changement d’attitude selon le parent présent : l’enfant devient une personne différente chez papa et chez maman
• Mutisme sélectif : il refuse de parler de ce qu’il vit chez l’autre parent
• Agitation avant et après les transitions : crises de colère, pleurs, ou au contraire repli sur soi
• Comportements de “messager” : il rapporte spontanément des informations d’un parent à l’autre
• Attitude de “petit adulte” : il prend soin du parent qu’il perçoit comme fragile
Les signes émotionnels
• Culpabilité diffuse : il s’excuse constamment, même sans raison
• Anxiété chronique : troubles du sommeil, maux de ventre, peurs nouvelles
• Tristesse inexpliquée : il semble porter un poids trop lourd pour son âge
• Colère explosive : décharges émotionnelles disproportionnées
• Retrait social : il s’isole de ses amis, perd intérêt pour ses activités
Les verbalisations révélatrices
Certaines phrases prononcées par l’enfant doivent alerter :
“Je ne veux pas que tu sois triste si je te dis que j’ai aimé chez papa/maman.”
“Papa/maman dit que tu…” (rapporte des propos négatifs)
“C’est ma faute si vous vous êtes séparés.”
“Je dois choisir entre vous deux.”
L’instrumentalisation par le parent pervers narcissique
Chez le pervers narcissique, la démarche de réhabilitation de l’ego post-rupture par le biais des enfants s’accompagne d’une volonté de continuer à faire souffrir l’autre parent. Faisant d’une pierre deux coups, le manipulateur sadique utilise ses petits comme moyens de punir et tourmenter indéfiniment l’ex-partenaire, indifférent au fait que sa progéniture en pâtira aussi largement.
Les techniques d’instrumentalisation
Le parent PN utilise plusieurs stratégies pour créer et entretenir le conflit de loyauté :
• Le dénigrement systématique : critique constante de l’autre parent devant l’enfant
• La victimisation : se présenter comme la victime de l’autre parent pour susciter la protection de l’enfant
• L’interrogatoire : questionner l’enfant sur ce qui se passe chez l’autre parent
• Les messages passés par l’enfant : l’utiliser comme messager pour des informations conflictuelles
• Le chantage affectif : conditionner son amour à la loyauté exclusive de l’enfant
• La comparaison dévalorisante : opposer les deux foyers en dévalorisant celui de l’autre parent
Le but recherché
“Faire payer” à l’ex-conjoint son départ passe par le chantage ou les coups bas intempestifs comme les retards de paiement de pension alimentaire (l’argent étant l’un de ses meilleurs moyens de soumission), la rétention de papiers d’identité des enfants, la non-communication de données importantes, etc.
L’objectif du pervers narcissique n’est pas le bien-être de l’enfant — il n’en a pas la capacité — mais la poursuite de l’emprise sur son ex-victime par le seul canal qui reste disponible : les enfants communs.
Quelle attitude parentale adopter pour protéger l’enfant ?
Préserver les enfants des tirs croisés entre parents
Malheureusement, l’enfant est souvent le messager, ou du moins un récepteur, d’informations qui ne devraient regarder que les adultes. Ainsi, l’un des pièges qu’il faut savoir déjouer pour éviter le conflit de loyauté, c’est de demander à son fils ou sa fille de rappeler au papa ou à la maman de rapporter le chèque, le vêtement, le passeport ou le carnet de santé.
C’est une erreur. Cela place l’enfant dans une situation stressante et l’expose à une réponse agacée du destinataire du message, dont il se sentira fatalement coupable.
Sanctuariser la communication adulte
La communication entre adultes doit impérativement se faire par d’autres biais :
• Un cahier de liaison
• L’échange d’emails (qui laissent des traces)
• Les avocats respectifs si la guerre est véhémente
• Une application de coparentalité
Si l’ex-conjoint PN fait tout son possible pour créer ces situations de discorde, il ne faut pas céder à chaud aux provocations, quitte à pratiquer le non-contact.
Ne pas sacrifier l’empathie infantile pour l’aliénation parentale
L’autre danger qui guette les enfants, c’est que le parent fragilisé cherche du réconfort auprès de sa progéniture et risque de s’épancher sur les travers de son ex-partenaire, tout en adoptant une attitude de victime. Si l’ex-conjoint de PN succombera à ce besoin de réconfort inapproprié sans mauvaise intention de départ, le manipulateur pervers, lui, saura jouer cette comédie sciemment.
Ainsi, l’enfant aura un réflexe protecteur envers son parent en difficulté et pourra montrer, par fidélité, de l’animosité envers l’autre représentant de l’autorité parentale désigné responsable de cette situation.
Préserver l’image de l’autre parent
Ce ressentiment du mineur ne doit pas être encouragé, même de façon inconsciente, car il bloque le processus d’identification essentiel à l’être humain pour se construire. Peu importe l’opinion que l’on se fait de son ex-partenaire : les petits ont besoin de grandir avec une image rassurante de la figure paternelle ET de la figure maternelle.
Entacher cette idéalisation de la réalité contribue à créer chez eux un sentiment d’insécurité qui peut perdurer. Or, rappelons-le, l’enjeu du développement de son enfant est à placer en priorité sur toute autre question, aussi virulent soit le combat parental.
De plus, il faut accepter que sa progéniture aime ses deux géniteurs, car chez lui, détester l’un des deux revient à exécrer une partie de soi-même. Renier à son enfant le droit d’avoir une opinion différente de la sienne, c’est rejeter son altérité, ce qui peut, dans les cas extrêmes, aller plus loin que le conflit de loyauté et causer le syndrome d’aliénation parentale.
Stratégies concrètes pour protéger l’enfant
Ce qu’il faut faire
• Valider les émotions de l’enfant sans les orienter : “Je comprends que c’est difficile pour toi”
• Lui donner la permission d’aimer ses deux parents : “Tu as le droit d’aimer papa/maman, c’est normal”
• Le rassurer sur son absence de responsabilité : “Ce qui se passe entre nous n’est pas ta faute”
• Créer un espace neutre où il n’a pas à prendre parti
• Consulter un thérapeute spécialisé si les signes de souffrance persistent
Ce qu’il faut éviter absolument
• La question piège : “Tu préfères vivre chez papa ou chez maman ?” Cette phrase, avec le sacrifice et la culpabilité qu’elle induit, résume à elle seule le principe fondamental à retenir
• Le dénigrement de l’autre parent devant l’enfant, même s’il le mérite
• Les confidences d’adulte sur les torts de l’ex-conjoint
• L’utilisation de l’enfant comme espion : “Qu’est-ce qui s’est passé chez papa/maman ?”
• La récompense de la déloyauté envers l’autre parent
Quand le parent PN manipule l’enfant
Lorsque l’enfant revient avec des propos manifestement insufflés par le parent PN, la tentation est grande de rétablir “la vérité”. Pourtant, la meilleure réponse est souvent :
• Ne pas contre-attaquer : cela renforcerait le conflit de loyauté
• Accueillir sans valider : “Je comprends que papa/maman t’a dit cela”
• Proposer une autre perspective sans imposer : “De mon côté, voici comment je vois les choses”
• Faire confiance au temps : l’enfant finira par percevoir la réalité
Conclusion : l’enfant ne doit jamais être un champ de bataille
Pour trouver la meilleure façon d’éviter le conflit de loyauté chez l’enfant, gardons en tête que l’une des pires questions à poser à son fils ou à sa fille, c’est : “Tu préfères vivre chez papa ou chez maman ?”. Cette phrase résume à elle seule le principe fondamental à retenir dans les moments d’emportement.
Il appartient à chaque adulte de fournir un cadre de vie rassurant et paisible aux enfants. Ils finiront ensuite par exprimer leurs choix clairement lorsqu’ils seront prêts. Pour les accompagner au mieux à travers les tourments des ruptures conflictuelles, il faut veiller à ne pas devenir soi-même un parent toxique, surtout lorsque l’ex-conjoint est un pervers narcissique.
Se faire aiguiller par un professionnel spécialiste des personnalités manipulatrices et de leurs techniques sera d’une grande utilité pour tout le monde, la priorité restant de préserver les mineurs des questions à régler exclusivement entre majeurs.
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FAQ : Questions fréquentes sur le conflit de loyauté
Comment protéger mes enfants du conflit de loyauté créé par le PN ?
Restez neutre publiquement : ne dénigrez jamais l’autre parent devant les enfants, même s’il le mérite. Rassurez-les : “Tu as le droit d’aimer papa/maman, je ne t’en voudrai jamais”. Validez leurs émotions sans juger. Documentez discrètement les comportements toxiques pour le dossier juridique, mais ne chargez jamais l’enfant de cette responsabilité. Un suivi psychologique pour l’enfant avec un thérapeute connaissant l’aliénation parentale est crucial.
Mon enfant refuse de me voir depuis qu’il vit avec son père PN, que faire ?
C’est un signe d’aliénation parentale avancée. Ne forcez pas le contact, cela confirmerait le discours du PN (“tu vois, il/elle est violent(e)”). Continuez d’envoyer des messages d’amour sans exiger de réponse. Saisissez le juge aux affaires familiales avec preuves de l’aliénation. Demandez une expertise psychologique. Gardez espoir : à l’adolescence ou à l’âge adulte, beaucoup d’enfants aliénés comprennent la manipulation et reprennent contact.
Le PN peut-il perdre la garde s’il crée un conflit de loyauté ?
Oui, si l’aliénation parentale est prouvée et reconnue par le juge. Mais c’est un combat judiciaire long et difficile. Il faut des preuves solides : témoignages, expertises psychologiques, messages écrits du PN, comportements documentés de l’enfant. Certains juges sont formés à l’aliénation parentale, d’autres non. Prenez un avocat spécialisé en droit de la famille qui connaît les PN. La résidence peut être transférée au parent aliéné si le danger psychologique est établi.
Comment expliquer à mes enfants que leur père/mère est un PN ?
Ne le faites pas, surtout s’ils sont mineurs. Ils ne doivent pas porter ce poids. Votre rôle est de les protéger émotionnellement, pas de les “conscientiser”. Dites plutôt : “Parfois papa/maman dit ou fait des choses qui ne sont pas correctes, ce n’est pas ta faute, tu n’as rien à réparer”. À l’âge adulte, si nécessaire, vous pourrez avoir cette conversation, mais laissez-les venir à leurs propres conclusions naturellement.
